Nous avons vu dans la section 3.2 que chaque cône, L, M ou S est sensible à une certaine plage de longueurs d'ondes. La sensibilité de chaque cône aux différentes longueurs d'ondes peut être décrite par trois fonctions , et décrivant la sensibilité des cônes L, M et S à chaque longueur d'onde. La réponse d'un cône étant proportionnelle à la somme de ses excitations, la réponse des cônes L, M et S à un spectre donné peut être modélisée par:
L'équation 4.1 peut se voir comme une projection du spectre sur le sous espace engendré par les vecteurs , et . Ce sous espace appelé Le sous espace Visuel Humain décrit la partie des spectres que nous sommes capables de percevoir. La quantité décrit les coordonnées de la projection du spectre dans la base , , et peut s'interpréter comme une mesure de la sensation colorée lors de la perception du spectre .
Le vecteur 3D représentant la sensation colorée liée à la perception du spectre , nous pourrions considérer que représente la couleur associée à . Toutefois, la sensibilité des cônes , et déterminée par les fonctions , et est difficile à mesurer puisqu'elle nécessite de brancher des électrodes sur différents cônes d'un observateur humain. De plus, tout changement de base dans le sous espace Visuel Humain nous donnera une mesure équivalente de la couleur. Nous allons donc essayer de déterminer des bases permettant de calculer plus facilement les triplets représentant une couleur. Ces expériences sont appelées des mises en correspondance de couleurs.
Supposons que nous disposions de trois sources lumineuses , , colorimétriquement indépendantes telles que les trois vecteurs , et forment une base libre de . Toute couleur peut donc s'écrire comme une combinaison linéaire de ces trois vecteurs :
color_matchingL'expérience d'appariement de couleurs
Le vecteur défini par l'équation 4.2 peut comporter une ou plusieurs composantes négatives. Ces coefficients ne peuvent donc pas être déterminés par l'expérience précédente où les sujets ne peuvent envoyer que des quantités positives de lumières sur l'écran. Dans ce cas, le sujet est autorisé à déplacer un ou plusieurs projecteurs de l'autre côté (voir Figure 4.2). Si l'on suppose que est le coefficient négatif, ceci revient à faire l'appariement :
color_matching2Appariement avec des couleurs négatives
L'équation 4.2 montre que si l'on connait les triplets correspondant à un ensemble de spectres, l'on peut connaître les triplets de n'importe qu'elle combinaison de ces spectres. En effet, si représente un ensemble de spectres, chaque étant décrit par un triplet , alors n'importe qu'elle combinaison de ces spectres donnera une impression colorée définie par :
Plutôt que déterminer expérimentalement les coefficients de toutes les couleurs visibles, ce qui est matériellement impossible, on peut en utilisant la linéarité décrite dans le paragraphe précédent mesurer ces coefficients uniquement pour une base de . Etant donnés les coefficients de chaque élément de cette base, l'on peut reconstruire n'importe quel spectre et donc obtenir son triplet associé par simple combinaison linéaire. Soit la base canonique de . Nous pouvons mesurer pour chaque le coefficient associé. On a donc pour tout appartenant à 1N :
De l'équation 4.5 nous pouvons déduire l'expression de A :
Nous pouvons donc indifférement exprimer des couleurs à l'aide de la matrice ou de la matrice . La différence essentielle entre ces deux modes de représentation est que la matrice ne peut s'obtenir qu'avec des mesures extrêmement délicates de la sensibilité des cônes alors que la matrice peut s'obtenir à l'aide d'expériences d'appariements (voir Figures 4.1 et 4.2) nettement plus simples à réaliser.